Les éléments clés du projet

Date de début du projet : 2011 (en France) Personnes participants au projet : 1 à 2 personnes salariées et 400 à 500 membres, les « accordeurs », par accorderie. En « vitesse de croisière » 1000 membres par accorderie Mode de financement : principalement des subventions privées et publiques Entités publiques associées au projet : Ville de Paris, Conseil Régional de Rhône Alpes Entités privées associées au projet : à l’échelle nationale : Fondation Macif, Secours Catholique, Avise Site internet/blog du projet : www.accorderie.fr

L'idée générale

Née au Québec, en 2002, l’Accorderie est un concept solidaire qui vise à lutter contre la pauvreté et l’exclusion et à favoriser la mixité sociale. Il repose sur un principe simple : proposer aux habitants d’un même quartier de se regrouper pour échanger entre eux des services, sur la base de leurs savoir-faire et ce sans aucune contrepartie financière. Concrètement, un membre, appelé « Accordeur », qui effectue, par exemple, une heure de dépannage informatique se voit attribuer un crédit de temps qu’il peut ensuite utiliser pour obtenir l’un des services proposés par d’autres « Accordeurs » de son quartier. Les accordeurs peuvent mettre également en place des activités collectives d’échange afin d’améliorer leur condition de vie. Au Québec, par exemple, des activités de crédit solidaire ainsi que des groupements d’achat de denrées alimentaires sont initiés et administrés par les accordeurs eux-mêmes. Dans ce système, implanté localement à l’échelle d’un quartier, d’une petite ville ou d’un regroupement de communes rurales, la monnaie est dite « sociale ». L’unité d’échange est le temps. A l’Accorderie, une heure de service donné équivaut à une heure de service reçu. Tous les services sont mis sous le même pied d’égalité. Le modèle Accorderie est conçu sur un principe de reconnaissance des capacités et de la contribution des gens. Son action permet de développer le pouvoir d’agir individuel et collectif.

Trois types d’échange sont possibles : - l’échange individuel, qui se réalise entre deux membres ou entre un membre et un petit groupe de membres (petit bricolage, déménagement, initiation aux langues étrangères, etc.) ; - l’échange collectif, par lequel l’accorderie offre des services d’intérêt général qui s’adressent à l’ensemble de ses membres (groupes d’achats de denrées alimentaires, crédit solidaire, etc.) - l’échange associatif, où l’accorderie rémunère des accordeurs pour l’implication dans la prise en charge du fonctionnement (accueil de nouveaux membres, etc.)

Le contexte

L’accorderie a pour mission de combattre la pauvreté et l’exclusion sociale en renforçant les solidarités dans la communauté locale entre des personnes d’âges, de classes sociales, de nationalités et de sexes différents. Une accorderie se créé sur un territoire, urbain ou rural, touché par la pauvreté et l’exclusion sociale.

Le point de départ

La première accorderie est fondée à Québec en 2002 par la Caisse d’économie solidaire Desjardins et la Fondation Saint-Roch dans le but de lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale la Caisse d’économie solidaire Desjardins. Ces deux organismes souhaitaient répondre aux besoins des personnes en situation de pauvreté ou d’exclusion sociale tout en favorisant l’organisation de nouvelles formes de solidarité. Cette organisation a mis en place un système d’échange de services, ainsi que deux activités collectives d’échange, soit un service d’achat regroupé de nourriture et un projet de crédit solidaire afin d’accorder de petits prêts à ses membres n’ayant pas accès au crédit. Compte tenu de l’intérêt démontré envers le concept de l’accorderie par plusieurs acteurs de diverses régions du Québec, il est décidé, en 2006, de fonder le Réseau Accorderie pour soutenir le démarrage de nouvelles accorderies. En 2013, on compte 7 accorderies au Québec. En 2008, les présidents de la Fondation Macif et du Secours Catholique découvrent ce concept innovant. La fondation Macif développe alors un partenariat avec le Réseau Accorderie du Québec afin de transférer cette innovation en France. Suite à une étude menée dans le 19e arrondissement de Paris, la première accorderie est inaugurée à l’automne 2011. Depuis, la fondation Macif a associé d’autres partenaires pour permettre l’essaimage des accorderies en France. En mai 2013, 6 accorderies sont en activité en France.

Comment ça marche ?

Avant la création de l’accorderie : Il est essentiel tout d’abord de ne pas oublier la finalité du projet : lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale. Il est nécessaire également d’adhérer aux principes d’actions et aux valeurs communes à toutes les accorderies (valeurs de solidarité et de coopération, système d’échange de service basé uniquement sur le temps, échange de service basé sur l’égalité, échanges individuels et collectifs, prise en charge du fonctionnement par les membres (accordeurs), réseau ouvert à toute personne…) Le projet, ancré sur un territoire touché par la pauvreté, est porté collectivement, en lien avec la société civile. Les partenaires financiers potentiels (collectivités locales, financeurs privés…) sont associés également au processus de création. Les financements doivent être assurés au démarrage de l’accorderie, avec un engagement fort de la part des partenaires.

Une fois l’accorderie créée : Le modèle de l’accorderie repose avant tout sur la participation de ses membres, les accordeurs, à la prise en charge du fonctionnement. Les accordeurs sont impliqués également dans le processus de décision de l’accorderie. Il est nécessaire que la participation des accordeurs soit recherchée ainsi l’accorderie doit valoriser les talents, contributions et initiatives de chacun équitablement. Les administrateurs de l’accorderie devront veiller à faire adhérer des membres vivant des réalités socio-économiques diversifiées. Cette mixité sociale permet une plus grande gamme d’échange de services et conséquemment le développement de l'organisme. Les liens de solidarité intergénérationnelle, interculturelle et entre couches sociales différentes créent un levier économique qui bénéficie à tous les Accordeurs. Dans une accorderie, les échanges doivent être équilibrés. Tous les membres doivent demander des services et en donner pour que ça fonctionne.

Participation et gouvernance

Une accorderie est un projet de territoire. Toute création d’accorderie nécessite l’implication des citoyens, futurs accordeurs, les collectivités locales, des partenaires financiers et le tissu associatif. Tous sont animés par la volonté de lutter contre la pauvreté et de favoriser la mixité sociale sur leur territoire. Les accorderies favorisent la participation active de leurs membres dans leur engagement, dans le cadre de l’échange associatif, au sein de différents comités de travail, de vie associative. Les accordeurs sont incités également à prendre part, à titre bénévole, à la gouvernance démocratique de la structure. A moyen terme, les accordeurs deviennent majoritaires dans le processus de décision.

Contribution à la collectivité

La plupart des approches existantes pour lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale sont axées sur l’intervention directe, la formation adaptée, l’acquisition de compétences, l’insertion professionnelle, etc. D’autres approches assez novatrices, ont comme objectif d’accompagner les personnes, individuellement ou en groupe, afin qu’elles entrent, par elles-mêmes et pour elles-mêmes, dans un cycle de changement de leur propre situation. C’est particulièrement le cas de l’Accorderie, qui contribue à développer le pouvoir d’agir des personnes et des groupes d’individus par l’échange de service et la coopération. Ainsi nous sortons d’une logique prestataire/bénéficiaire de programme d’aide sociale pour rentrer dans une dynamique où l’on est pleinement acteur de son changement. Tout en permettant la mixité sociale, où les personnes issues de milieux culturels, économiques et sociaux différents apprennent les uns des autres, les Accorderies facilitent la prise de conscience, la confiance en soi et la solidarité.

Défis

Le principal défi à relever est le modèle économique de l’accorderie. Si le concept suscite facilement l’adhésion, il convient d’associer une diversité de financeurs (collectivités locales, fondations, entreprises privées…), mais également de réfléchir à d’autres formes de financement (crowdfunding, activités d’autofinancement…).

Propositions

Les changements à apporter sont avant tout culturels. Comment changer les regards sur les personnes en situation de pauvreté, et les citoyens de manière générale et ne plus les considérer comme des usagers d’un dispositif mais croire en leurs potentiels individuels et collectifs pour qu’ils se mobilisent pour changer leur propre situation ? Il sera également nécessaire que la monnaie sociale, à base d’échange se services soit reconnue, afin qu’il ne soit pas possible de considérer l’échange de service, dans ce cadre, comme du travail clandestin.

Les perspectives du projet

De nombreuses accorderies se créent en France. Celles-ci vont se constituer en un réseau, entité juridiquement constituée. Il aura pour mandat de favoriser et d’accompagner l’émergence et le démarrage de nouvelles accorderies et les réunir afin qu’elles se donnent des services en commun. Une quinzaine d’accorderie devraient ouvrir dans les prochains mois en France.